Dans le royaume du rap, règne King P, congolais de Brazzaville ayant roulé sa bosse à Simou-Djoué, aux Etats-Unis et au Canada. Ce qui frappe chez le King c’est sa façon de mettre à mal le tempo. Il le casse comme savent le faire les musiciens du free-jazz. Ca fait du bien au hip hop. « Tu sors des sentiers battus » lui ai-je dit. En effet, son clip, « Miamona mbua », repose sur un je ne sais quoi d’iconoclaste qui en dit long sur sa conception de l’audace dans la vie. C’est ce côté destroy qui a attiré notre attention de maniaque de l’inédit en musique.
Comme la plupart des génies, King a du mal à acquérir la légitimité du succès. Cela tient moins de la structure de sa musique que de la politique de publication. Dans la dense forêt musicale de YouTube, il est difficile de se distinguer quand bien-même le talent et la qualité sont là. Sans mécène, pas de scène.
« Désormais on vous verra » lui ai-je promis.
Le moins qu’on puisse dire, « Miamona mbua » (le titre du clip) a du chien. Non seulement pour son côté mordant, mais aussi parce qu’il aboie son amertume contre ses adversaires (les contre moléma) qu’il recommande à Dieu pour l’avoir jeté, lui le King, en pâture aux…chiens. Dieu, merci, lui-même, le king, est sous protection divine comme la plupart des disciples de la Muse. « Mé wa sémo » indique-t-il aux païens qui arpentent le royaume du péché, limitrophe de celui du bien.
Un caractère de chien
« Mia mona mbua » est un réseau d’injonctions et de mise en garde qui, pour désigner clairement sa cible (la société), ne dissimule pas moins un acte-manqué comme savent si bien le faire les artistes, ces inconditionnels de la périphrase, a fortiori dans nos pays où il faut ruser en permanence avec le contrôle afin d’échapper aux difficultés. Venant d’un radical de la dénonciation (c’est la fonction du rappeur /slameur) il n’est que trop évident que le texte canin du King vise ceux qui oppriment. Suivez notre regard.
On est tous Burkinabés
Il fut un temps, en effet, où malgré les coups, les damnés de la terre refoulaient leur colère. Désormais l’époque du non-dit est révolue. Le défoulement se veut total, comme au Burkina Faso où bien que les acteurs du changement se soient laissé prendre par les « chiens couchants de l’impérialiste » pour avoir dormi sur leurs lauriers, les putschistes de la petite semaine seront bientôt remis à leur place.
De ce fait, le peuple Congolais réclame sa liberté.
Chien perdu sans collier
« Miamona mbua mia sukina ku ntima » : démuni de parole, l’expression de la colère du clébard, animal domestique, se limite à des aboiements, malgré les coups assénés par le maître trop content de se nicher derrière le dicton « le chien aboie, la caravane passe ».