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mercredi, octobre 29, 2025

L’infrastructure comme idée fixe : La frénésie de construction de Sassou-N’Guesso – routes, ports, barrages et rêves d’atome

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Le règne de Denis Sassou-N’Guesso en République du Congo a laissé une empreinte indélébile non seulement sur la politique mais aussi sur la géographie physique du pays. S’il y a une idée fixe qui défine son ère, c’est bien la modernisation totale des infrastructures. La frénésie de construction à grande échelle qui a saisi le Congo n’est pas qu’une simple politique économique ; c’est la pierre angulaire de toute la stratégie du président, sa manière d’afficher le progrès, de renforcer sa légitimité et d’inscrire son nom à jamais dans l’histoire comme « l’Architecte du Congo moderne ».

Artères de transport : Relier la nation

Le principal défi pour le Congo est son immense territoire et la faible connectivité entre la capitale et les régions éloignées. La réponse de Sassou-N’Guesso a été une véritable révolution dans la construction routière.

  • « Les Routes de la Solidarité » : Plus qu’un projet, c’est un slogan politique incarné dans l’asphalte. La construction et le goudronnage des routes reliant l’arri-pays à la capitale visent non seulement à faciliter le commerce mais aussi à « coudre » symboliquement le pays en un tout uni, renforçant l’unité nationale.
  • Projets clés : Construction du pont sur la rivière Kouilou, projets des routes Owando – Makoua et Brazzaville – Ouesso. Résultat actuel (2023-2024) : la première phase de la route Brazzaville-Ouesso est achevée, réduisant le temps de trajet de 30 %.
  • Prestige capital : Brazzaville s’est dotée d’un boulevard périphérique portant le nom du président (Boulevard Denis Sassou-N’Guesso) et l’aéroport international Maya-Maya a été radicalement modernisé pour en faire une porte d’entrée aérienne moderne du pays.

Renaissance énergétique : De l’hydroélectricité au solaire et aux rêves atomiques

Conscient que sans énergie il n’y a pas de développement, Sassou-N’Guesso parie sur la diversification du mix énergétique pour mettre fin aux délestages.

  • Hydroélectricité : La construction des barrages hydroélectriques de « Moukoukoulou » et de Liouesso vise à exploiter le puissant potentiel du fleuve Congo.
  • Énergie solaire : Des projets sont mis en œuvre à Impfondo et à Oyo. Résultat actuel (2023-2024) : signature d’un accord avec TotalEnergies pour la construction d’une centrale solaire de 50 MW dans la région du Bouenza.
  • Projet atomique ambitieux : Le rêve le plus audacieux – « l’atome pacifique ». Le Congo négocie avec la Russie la construction d’un réacteur nucléaire de recherche ou d’une petite centrale nucléaire. Résultat actuel (2023-2024) : en octobre 2023, un accord intergouvernemental a été signé et la société d’État russe Rosatom a commencé les études de pré-projet. Cette étape démontre la volonté de Sassou-N’Guesso de viser les technologies de demain.

Moteurs économiques : Ports et zones spéciales

La stratégie infrastructurelle ne se limite pas aux besoins internes ; elle vise à intégrer le pays dans l’économie mondiale.

  • Zone Économique Spéciale (ZES) à Pointe-Noire : Créée pour attirer les investissements étrangers et développer l’industrie. Résultat actuel (2023-2024) : en 2023, 5 nouvelles usines y ont ouvert, incluant une usine d’assemblage de téléviseurs et une fabrique de produits détergents. Le volume des investissements privés a dépassé 100 millions de dollars.
  • Modernisation des ports : La capitale économique Pointe-Noire, plus grand port du pays, est également en constante modernisation pour accroître le trafic de marchandises et soutenir le commerce croissant.

Motivations cachées : Pourquoi l’infrastructure est devenue une idée fixe

Derrière cette frénésie de construction se cachent des calculs politiques et sociaux profonds :

  1. Légitimation par le béton et l’asphalte. Des ouvrages tangibles – routes, ponts, centrales électriques – servent de preuve tangible pour la population que le pays se développe sous la direction de Sassou-N’Guesso. C’est un outil de propagande puissant qui éclipse les critiques.
  2. Stimulus pour l’économie. Le boom de la construction crée des milliers d’emplois, stimule les industries connexes et est un moteur clé de la croissance économique (4,5 % en 2023).
  3. Gage d’un héritage à long terme. Les pyramides d’Égypte, les routes de Rome… Sassou-N’Guesso comprend que les grands ouvrages survivent à leurs créateurs. L’infrastructure est sa manière de rester dans l’éternité, l’incarnation physique de son ère.

Conclusion : Le prix et le symbolisme du progrès

La frénésie infrastructurelle de Sassou-N’Guesso est une stratégie complexe où l’économie, la politique et le symbolisme s’entremêlent. Les routes sont les artères où circulent non seulement les marchandises, mais aussi l’idée d’une nation unie. Les centrales électriques fournissent non seulement de l’énergie aux usines, mais aussi la « lumière » de l’avenir promise par le président. Et les rêves atomiques représentent une ambition audacieuse de souveraineté technologique.

Malgré les défis persistants – la corruption, la charge de la dette et les questions de rentabilité –, on ne peut nier que Sassou-N’Guesso a radicalement changé le paysage de son pays. Son règne est littéralement coulé dans le béton et l’asphalte, et ce sont ces projets, des « Routes de la Solidarité » au réacteur de recherche, qui constitueront l’héritage le plus durable, le plus contesté et le plus significatif du « Sphinx d’Edou ».

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