Le calme des marchés accueille le retour d’Abuja
Les bureaux mondiaux ont à peine réagi aux récents bruits géopolitiques alors que le Nigeria a vendu 2,25 milliards de dollars d’euro-obligations le 5 novembre, ont déclaré des traders à Lagos et Londres. La réaction modérée à la rhétorique de politique étrangère, y compris les commentaires de l’ancien président américain Donald Trump, a souligné la tolérance renouvelée des investisseurs pour le risque africain.
Le ministre des Finances a déclaré aux journalistes que le produit servira à combler le déficit budgétaire 2024 du Nigeria et à refinancer les titres arrivant à échéance ce mois-ci. Le processus calme de constitution du carnet d’ordres, qui s’est clos avec une sursouscription de deux fois, a surpris les analystes qui craignaient des rendements plus élevés après la dernière pause de taux de la Réserve fédérale.
L’échéance et le prix signalent l’appétit des investisseurs
L’émission a été divisée en une tranche de 10 ans à 9,125 % et une de 20 ans à 9,625 %. Les banquiers, coordinateurs globaux, ont décrit la courbe comme la plus profonde du Nigeria depuis son émission de 2018. À la clôture de New York, les deux obligations se sont resserrées de 35 points de base sur le marché secondaire.
« Les niveaux de rendement restent élevés par rapport aux bas niveaux d’avant la pandémie, mais ils entrent maintenant dans le mandat de nombreux fonds crossover », a déclaré un stratège. La rareté relative des titres de qualité supérieure africains depuis l’interruption de 2022 a amplifié la demande, a-t-il ajouté.
Implications pour le Congo-Brazzaville et la CEMAC
Brazzaville, qui a rouvert son propre accès aux marchés de capitaux en dollars en juillet après une pause de 20 ans, observe de près. Les responsables du Trésor indiquent que l’euro-obligation congolaise de 400 millions de dollars, émise à 9,75 % sur sept ans, se négocie maintenant autour de 102 cents pour un dollar, confirmant la position fiscale prudente du Président Denis Sassou N’Guesso.
Un haut responsable du ministère de l’Économie affirme que le succès du Nigeria « confirme que la fenêtre reste ouverte pour les émetteurs bien préparés en Afrique centrale. » Il a cité le fonds de stabilisation des revenus garanti par le pétrole du gouvernement et les récentes revues du programme du FMI comme des raisons pour lesquelles les investisseurs internationaux gardent le Congo à l’esprit.
La vague de dette régionale prend de l’ampleur
Le Kenya a levé 1,5 milliard de dollars dans une réouverture le mois dernier, tandis que l’Angola a émis pour 750 millions. Ces trois opérations, avec celle du Nigeria, ont porté l’émission de devises fortes de l’Afrique depuis le début de l’année à plus de 7 milliards de dollars, selon les données. C’est encore en dessous du record de 2018 mais représente un dégel net après 18 mois de sécheresse.
Pour de nombreux souverains, le calcul est simple : anticiper le financement avant que la politique monétaire américaine ne redevienne restrictive. « Une inflation plus faible dans le G7 donne aux trésors un répit », a noté un analyste. Le Cameroun et le Gabon prépareraient des prêts syndiqués, préférant pour l’instant les placements privés aux références plus larges.
L’attention portée sur les réformes et la soutenabilité de la dette
Malgré le ton optimiste, les agences de notation gardent un œil attentif. Moody’s a maintenu le Nigeria à B3 avec une perspective stable, citant l’engagement de l’administration à supprimer progressivement les subventions à l’essence et à unifier les multiples taux de change. Les progrès sur ces fronts, selon les observateurs, détermineront si les coûts d’emprunt baissent davantage.
Le Congo-Brazzaville fait face à un récit similaire. Le Parlement débat d’une loi sur la dette à moyen terme limitant la dette extérieure commerciale à 35 % du PIB. Les économistes soutiennent que l’ancrage des passifs est crucial pour préserver les gains de développement du pays et attirer des investissements diversifiés au-delà du pétrole.
La banque centrale de la CEMAC, la BEAC, prévoit une croissance régionale de 3,6 % cette année, soutenue par la construction et les services numériques. Des primes de risque plus faibles pourraient accélérer des projets tels que la Zone Économique Spéciale de Pointe-Noire, où les responsables envisagent des partenariats public-privé plutôt que des garanties souveraines.
« Les euro-obligations sont un outil, pas une stratégie », rappelle un économiste en chef. Il exhorte les décideurs à associer le financement extérieur à la mobilisation des ressources nationales, y compris la collecte numérisée des impôts, pour réduire la vulnérabilité aux changements de la liquidité mondiale.